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Un homme travaille sur un ordinateur portatif entouré de transactions de cryptomonnaie en arrière-plan.

Table des matières

Les lecteurs doivent savoir que les conclusions et les points de vue exprimés dans le présent rapport ne sont pas des conclusions de fait d’un comité d’audience de la CVMO et n’ont pas été vérifiés devant le tribunal de la CVMO ou un autre tribunal. Le présent rapport représente l’opinion du personnel sur les éléments de preuve examinés et, si d’autres dossiers et renseignements devenaient disponibles, ceux-ci pourraient avoir une incidence sur cette opinion.

Sommaire exécutif

La chute de la plateforme d’échange d’actifs en cryptomonnaie QuadrigaCX (Quadriga) est le résultat d’une fraude commise par le cofondateur et directeur général de Quadriga, Gerald Cotten (M. Cotten). Les clients ont confié leurs avoirs à Quadriga, qui a fourni de fausses garanties que ces avoirs seraient sauvegardés. En réalité, M. Cotten a dépensé, échangé et utilisé ces actifs à volonté. Fonctionnant sans aucun système de surveillance ou de contrôle interne approprié, M. Cotten a pu faire un usage abusif des actifs des clients pendant des années, sans contrôle ni détection, entraînant finalement la chute de toute la plateforme.

M. Cotten a pu faire un usage abusif des actifs des clients pendant des années, sans contrôle ni détection, entraînant finalement la chute de toute la plateforme.

L’effondrement de Quadriga a causé des pertes massives aux investisseurs du Canada et du monde entier. Le 14 janvier 2019, Quadriga a annoncé que M. Cotten était décédé en Inde le mois précédent. À compter du 5 février, la plateforme Quadriga avait cessé ses activités et demandé à se protéger contre ses créanciers. Un total de d’actifs étaient dus à plus de 76 000 clients, dont 40 % environ étaient des Ontariens. Ernst & Young, le syndic de faillite, n’a pu récupérer ou localiser que 46 millions de dollars d’actifs à verser aux clients. Les personnes qui avaient confié leur argent et cryptomonnaies à Quadriga ont donc collectivement perdu au moins 169 millions de dollars.

Le personnel de la Direction générale de l’application de la loi de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) a entrepris un examen des activités commerciales de Quadriga afin de déterminer la façon dont la plateforme était gérée, les causes de son effondrement et ce qu’il est advenu des fonds. Sur une période d’environ dix mois, une équipe pluridisciplinaire de la Direction générale de l’application de la loi a analysé les données relatives aux échanges et aux chaînes de blocs, a interrogé des témoins clés et a collaboré avec de nombreux organismes de réglementation au Canada et à l’étranger.

Note de bas de page 1

Tous les montants sont exprimés en dollars canadiens, sauf indication contraire.

La majeure partie du manque à gagner de 169 millions de dollars résulte de la conduite frauduleuse de M. Cotten.

Beaucoup ont spéculé que la majeure partie des pertes des investisseurs résultait de la perte ou de l’inaccessibilité des actifs en cryptomonnaie à la suite du décès de M. Cotten. Selon notre examen, ce n’était pas le cas. Les faits démontrent que la majeure partie du manque à gagner de 169 millions de dollars résulte de la conduite frauduleuse de M. Cotten, qui a pris plusieurs formes.

La plus grande partie du manque à gagner – environ 115 millions de dollars – provient des transactions frauduleuses de M. Cotten sur la plateforme Quadriga. M. Cotten a ouvert des comptes Quadriga sous des pseudonymes et s’est crédité de devises fictives et de cryptoactifs qu’il a échangés avec des clients de Quadriga qui ne se doutaient de rien. Il a subi des pertes réelles lorsque le prix des cryptoactifs a changé, créant un déficit d’actifs pour satisfaire les retraits des clients. M. Cotten a couvert ce manque à gagner avec les dépôts d’autres clients. En fait, cela signifiait que Quadriga fonctionnait comme un stratagème de Ponzi.

M. Cotten a perdu 28 millions de dollars supplémentaires en négociant les actifs des clients sur trois plateformes externes de négociation de cryptoactifs sans obtenir leur autorisation ou les aviser. Il a également détourné des millions de dollars d’actifs de clients pour financer son mode de vie. Dans ses derniers mois, Quadriga n’avait presque plus d’actifs et fonctionnait comme une porte tournante – les nouveaux dépôts de clients étaient immédiatement redirigés pour financer les retraits d’autres clients.

Ce qui s’est produit avec Quadriga était une fraude traditionnelle enveloppée dans une technologie moderne.

Ce qui s’est produit avec Quadriga était une fraude traditionnelle enveloppée dans une technologie moderne. Les stratagèmes de Ponzi, les transactions non autorisées avec les fonds des clients et le détournement d’actifs n’ont rien de nouveau. Toutefois, les plateformes de négociation de cryptoactifs sont nouvelles et le cadre réglementaire de ces plateformes est en évolution. Quadriga ne considérait pas que son activité impliquait le commerce des valeurs mobilières. La société ne s’est donc jamais inscrite auprès d’un organisme de réglementation des valeurs mobilières. Cette absence d’enregistrement, de même que l’absence de contrôle interne, ont permis à M. Cotten de commettre une fraude à grande échelle plus facilement sans être détecté. À partir de 2016, M. Cotten a pris le contrôle exclusif d’une société qui comptait des centaines de milliers de clients qui a effectué des transactions portant sur plus d’un milliard de dollars d’actifs libellés en monnaie fiduciaire et plus de cinq millions d’unités de cryptomonnaies. Il dirigeait l’entreprise comme il le jugeait bon, sans système de surveillance ou de contrôle interne adéquat ni livres et registres appropriés.

De même, les clients de Quadriga n’auraient pas pu savoir ce que M. Cotten faisait. Dans le cadre du modèle commercial de Quadriga, les clients confiaient leur argent et leurs actifs en cryptomonnaie à Quadriga. Quadriga n’a fourni aucune information pertinente sur la manière dont ces avoirs étaient stockés, déplacés et dépensés. Au contraire, Quadriga a fourni de fausses assurances sur le stockage de ces actifs. Les clients n’avaient aucun moyen de vérifier ces affirmations ou d’obtenir des renseignements pertinents sur la gestion de leurs actifs. Ce manque de transparence a également facilité la fraude de M. Cotten.

Normalement, ces conclusions auraient probablement conduit à prendre des mesures coercitives contre M. Cotten ou Quadriga. Cependant, cela n’est pas une solution pratique étant donné que M. Cotten est décédé et que Quadriga est en faillite, ses actifs étant soumis à un processus de distribution supervisé par un tribunal. Néanmoins, nous pensons qu’il est dans l’intérêt public de faire part de nos conclusions au public afin d’aider les investisseurs à comprendre ce qui est arrivé à Quadriga et, nous espérons, d’empêcher que ce type de situation ne se reproduise.

L’inconduite que nous avons découverte en rapport avec Quadriga est limitée à Quadriga et ne doit pas être comprise comme s’appliquant à l’ensemble du secteur des plateformes de négociation de cryptoactifs. Bien mené, l’échange de cryptoactifs est une composante légitime et importante de nos marchés de capitaux. Nous restons déterminés à collaborer avec cette industrie pour favoriser l’innovation. En effet, l’innovation financière a toujours été essentielle à la santé de notre économie et à la compétitivité de nos marchés de capitaux.

Il est tout aussi essentiel que les investisseurs aient confiance en l’accès aux nouvelles technologies et plateformes qui sont le moteur de cette innovation et de cette concurrence. À cette fin, le public investisseur doit savoir que l’utilisation de plateformes de négociation d’actifs en cryptomonnaie comporte des risques et que nombre de ces plateformes ne sont pas enregistrées et estiment qu’elles ne sont pas tenues de s’enregistrer auprès des autorités de réglementation des valeurs mobilières. Toute personne envisageant de confier des actifs à une plateforme de négociation de cryptoactifs doit prendre des mesures pour s’informer sur les opérations de cette plateforme et sur son approche de la gestion des risques avant de l’utiliser. Cela peut s’avérer impossible compte tenu du degré actuel de divulgation offert par certaines plateformes.

Les exploitants de plateformes doivent savoir que, selon leur modèle d’entreprise, ils seront peut-être tenus de s’inscrire auprès de la CVMO et qu’ils doivent prendre les mesures appropriées pour se conformer aux lois sur les valeurs mobilières de l’Ontario. Pour obtenir des conseils, les exploitants de plateformes devraient consulter l’avis 21-327 du personnel des ACVM : Indications sur l’application de la législation en valeurs mobilières aux entités facilitant la négociation de cryptoactifs et le document de consultation conjoint 21-402 ACVM/OCRCVM : Projet d’encadrement des plateformes de négociation de cryptoactifs. Les plateformes devraient également consulter : Issues, Risks and Regulatory Considerations Relating to Crypto Asset Trading Platforms (Enjeux, risques et considérations réglementaires liés aux plateformes de négociation de cryptoactifs), un rapport publié par l’Organisation internationale des commissions de valeurs. Les plateformes devraient examiner leurs opérations pour s’assurer qu’elles ont mis en place des procédures de gestion des risques pour leurs clients et qu’elles leur divulguent avec exactitude les informations clés sur leurs opérations.